Manager : l’exemple par le foot
Par COMPASS LABEL (@compasslabel)
Le management est une mission qui s’est depuis quelques années relativement complexifiée. Les bouleversements engendrés par l’irruption des technologies numériques dans tous nos rapports sociaux et professionnels ont contribué à faciliter tout en rendant plus délicate la tâche des managers et les relations avec leurs équipes. Il est même de plus en plus fréquent de constater une véritable déconnexion entre managers et collaborateurs, due notamment à une accélération des délais attendus de production et de réaction qui a conduit les managers à modifier leurs habitudes de travail et de communication avec leurs équipes. La multiplication d’obligations, de sollicitations, de responsabilités et de réunions rend la tâche des managers de plus en plus difficile en raison de toutes les activités chronophages qui les accaparent. Dans le cadre d’une relation de confiance, la communication se limite alors essentiellement à un contrôle ponctuel de la réalisation des tâches demandées et du bon déroulement des choses. Dans le cadre d’une relation de défiance, le manager finit par pressurer ses collaborateurs ou ne plus déléguer assez, créant ainsi un cercle vicieux au sein duquel il se retrouve toujours davantage submergé de travail, au lieu de prendre le temps de faire le point sur les forces et les faiblesses de chacun des membres de son équipe, et de donner du sens, un élan et une motivation supplémentaires à leur travail.
Mettons en perspective ces difficultés avec celles qui peuvent être rencontrées dans un des postes de management le moins évident à occuper : celui d’entraîneur de football à la tête d’une équipe professionnelle.
Pour emporter de belles victoires, chaque joueur doit à titre individuel mouiller le maillot et montrer toute l’étendue de son génie, de son intelligence collective et de sa lecture du jeu. Le manager, lui, doit combiner toutes ces qualités, mais pour 23 personnes. Et doit surtout trouver le bon équilibre entre et la rigueur que requiert la pratique du sport de haut niveau et de la compétition, et le dialogue avec ses joueurs, afin de ne pas froisser les égos et de maintenir motivation et ambiance positive dans le vestiaire.
Prenons l’exemple de nos sélectionneurs de l’équipe de France de football. Didier Deschamps s’est révélé être un génie de l’intelligence collective en constituant pour la Coupe du Monde 2018 avec habilité un groupe où chaque joueur avait sa place et un rôle déterminés, et une volonté de donner son maximum pour les autres avant de penser à soi-même (défi d’autant plus relevé que la composition de l’équipe faisait la part belle à des superstars jouant dans les plus grands clubs d’Europe). La différence d’attitude d’un joueur tel que Kylian Mbappé lorsqu’il porte le maillot des Bleus ou celui de son club le Paris Saint-Germain est édifiante. Et le secret d’un management équilibré va au-delà du terrain dans ce cas précis.
En effet, c’est notamment dans la gestion de crise que le manager peut faire la différence. L’anecdote de l’incident de l’extincteur – déclenché volontairement par les joueurs – survenu à l’hôtel qui accueillait en Russie l’équipe de France masculine pendant le Mondial est en ce sens intéressante. Le sélectionneur, descendu lui aussi de sa chambre pour cause d’évacuation de l’hôtel, a fait le choix de ne pas aller sanctionner ses joueurs, mais par sa simple présence au loin et un regard appuyé, de leur faire comprendre que leur geste ne correspondait pas au professionnalisme et au respect que l’on peut attendre d’athlètes professionnels.
Quant à Corinne Diacre, il n’est pas étonnant qu’elle ait été confirmée à son poste comme sélectionneure de l’équipe de France suite à la Coupe du monde de 2019. Il semblerait en effet que celle qui est parfois présentée comme une coach particulièrement stricte, au regard bleu acier sévère, sache faire preuve d’une subtile alchimie entre écoute et fermeté. Une fois passé le délicat épisode de mise au point par médias interposés sur le positionnement latéral d’Eugénie le Sommer pendant le Mondial, Corinne Diacre a déclaré dès la fin de l’été vouloir être plus à l’écoute de ses joueuses. Elle a donc notamment accepté de faire jouer Amel Majri, à la demande de cette dernière, en position plus offensive. S’en sont suivis de spectaculaires buts de la numéro 10 de l’équipe de France en phase qualificative pour l’Euro 2021. On peut également souligner que ses choix de coaching en cours de jeu pendant le mondial se sont souvent avérés décisifs. Quant à l’enthousiasme du grand public et des médias pour cette compétition, il n’est pas totalement déconnecté de la dimension attachante du groupe que Corinne Diacre, qui a fait du vivre ensemble une priorité pour son équipe, a constitué.
Le sport, et notamment les sports collectifs, constitue une source d’inspiration vaste et pertinente pour l’amélioration des techniques de management, dans un contexte de forte pression, d’objectifs élevés, de dépassement de soi, de gestion de l’échec et d’intelligence collective. Il serait utile pour les managers de s’en inspirer.